retrouvailles

Elle n’en dormait plus la nuit. Grâce à un détective tourangeau et aux tests ADN, Michèle, née sous X, a retrouvé ses sœurs au terme d’un parcours épique.

La vie d’un détective privé se conjugue parfois au passé décomposé, quand il faut surprendre l’infidèle mari dans la moiteur d’un lit encore en bataille ou traquer le salarié indélicat qui confond arrêt maladie et congés payés. Et puis, il y a ces moments de grâce où celui qui épie devient celui qui relie, le chaînon manquant entre deux routes qui n’auraient jamais dû se croiser.

Du coup, la cuirasse se fend, les larmes coulent. Comment rester froid quand deux montagnes d’amour se rencontrent et s’étreignent, après des années passées à s’ignorer ? Michèle Christophel, 82 ans, boule de vie, à l’énergie inépuisable, vient de retrouver ses deux demi-sœurs, Françoise, 71 ans, et Josselyne, 75 ans, au bout de cinquante ans de recherche.

« Elle est venue me voir une première fois en 2009 », raconte Frabrice Brault, celui qui est aujourd’hui un des grands spécialistes français de la recherche dans l’intérêt de familles. « Je suis née sous X, me dit-elle, mais je ne veux pas mourir sous X. J’étudie son dossier pendant plusieurs semaines, mais je dispose de très peu d’éléments et je dois abandonner. »

Mais Michelle, qui a déjà consacré une quarantaine d’années de sa vie à chercher sa famille, ne lâche pas l’affaire. Elle participe à tous les colloques qui traitent du sujet. Y croise régulièrement le détective tourangeau qu’elle relance en 2016. Elle croit en de nouvelles pistes.

“ Je suis née sous X, je ne veux pas mourir sous X ”

En 2018, bien que la législation française interdise les tests ADN « récréatifs », elle se décide à sonder son passé. Celle qui se croyait gauloise pure souche, s’aperçoit qu’elle a aussi du sang arménien et italien. Au passage, elle se découvre un millier de cousins génétiques à travers le monde.

Fabrice Brault qui vient de suivre une formation de trois mois au Québec et aux USA sur la généalogie génétique, se sent alors de taille à défricher cette immense forêt de cousins pour dégager une courte liste. En mars dernier, les recherches amènent Michèle Christophel et Fabrice Brault vers un certain Olivier, localisé dans la région parisienne.

« Je prends contact avec lui, poursuit le Tourangeau, afin de le convaincre de nous aider en nous dévoilant l’histoire de sa famille. » Le travail d’enquête devient passionnant. « J’ai remonté l’arbre généalogique sur six générations et j’ai trouvé une trentaine d’ascendants communs à Olivier et Michèle. Un seul d’entre eux avait vécu sur la région parisienne entre 1935 et 1940… Jusqu’à trouver ses deux filles. »

Si Josselyne et Françoise sont épatées d’apprendre qu’une grande sœur aînée vit dans ce monde, elles n’en sont pas vraiment convaincues. « Elles savaient juste que leur père (décédé) qui s’était remarié à 37 ans, avait eu une vie avant, mais sans plus. »

Pour percer définitivement le mystère, les sœurs font un test ADN. Au bout de cinq semaines, le résultat tombe, sans aucune ambiguïté. C’est le mot SŒUR qui apparaît. Reste au détective à rassembler tout le monde à Perpignan sous les caméras de M6 qui n’en ratent pas une miette. Les sœurs sont folles de joie, Michèle explose de bonheur. Mais une question lui brûle encore la langue. « Qui était ma mère ? ».